On compare. Lesquelles a-t-il ressorties au Ryman de Nashville, au Massey Hall de Toronto ? On se prépare, on s'excite, on fait des prédictions. Fera-t-il l'une de ses chansons créées avec Burt Bacharach ? Ou toute la face A de l'album My Aim Is True, osée récemment ?
Forcément, on s'attend à autant. À différent, mais autant. On va voir le gaillard jouer le jeu du spectacle imprévible, mais long tout le temps. Quand on a le vaste et riche répertoire d'un Elvis Costello, tout semble possible, sauf d'écourter.
Pensait-on. À tort.
Notons : il a lui-même annoncé assez tôt un « 90-minute show ». Près de la fin, il promettra de « revenir et toutes les jouer ». On ne hasardera pas de suppositions, mais le fait est que, dans la conduite fournie aux journalistes, il y avait 31 titres. Parmi les prévues et retranchées: "King Horse," "Watch Your Step," "Almost Blue," "Quiet About It," "Man Out Of Time," "Suit Of Lights," "For The Stars," d'autres encore…
Ne pas savoir, elles ne nous manqueraient pas : seulement voilà, elles ont toutes été données ailleurs, la plupart des soirs…
Qu'avons-nous eu, tout de même ? Beaucoup, et du bon, avouons. Une entrée certes un peu précipitée, avec "Jack Of All Parades," "45" et "Either Side Of The Same Town" en rafale, puis "Veronica," la belle créée avec McCartney, que l'on a eu tout juste le temps d'apprécier. Après, l'homme s'étant calmé, ça se goûtait chanson après chanson.
On se dit qu'il avait lâché prise, et s'occupait à rendre à sa formidable manière ce qui restait : j'ai retenu le picking délicat dans "Poison Moon," le chouette medley "New Amsterdam"/"You've Got To Hide Your Love Away" (ou comment du Beatles peut sonner comme du Costello), une série de jolis morceaux ragtime (le standard "Walkin' My Baby Back Home," et sa propre "Jimmie Standing In The Rain," évoquant son grand-père qui jouait dans les orchestres des grands paquebots).
Il y a aussi eu l'orgie du générateur de boucle dans la très électrique "Watching The Detectives," l'exquise "Alison," la poignante "Shipbuilding," l'immense "The Last Year Of My Youth." Et la remise du Montreal Jazz Festival Spirit Award par André Ménard, qui a su faire vite. De quoi repartir à la fois content et… un peu interloqué.
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